Socom change de développeur et matine sa recette tactique d'action bourrée de testostérone. Pas très convaincant, le solo est largement relevé par une partie multijoueur très solide.
Alors que le Xbox Live en était à ses balbutiements et que le jeu en ligne sur PC connaissait un premier essor, la pourtant très peu
online-friendly Playstation 2 se dotait en 2003 de son premier jeu en ligne avec communication vocale. Si le service ne se développa pas plus que cela sur la machine, Socom et ses suites jouirent d’une bonne petite communauté bien décidée à jouer tactique en équipe. Zipper Interactive (Mag) reprend la licence huit ans plus tard, tandis que le support et les joueurs console se sont habitués au phénomène. Paré pour une révolution tactique ?
Un Socom enfin plus souple
Les premières minutes de jeu surprendront certainement les joueurs habitués à la rigidité des épisodes précédents : Zipper Interactive a en effet décidé de rendre le
contrôle plus fluide et les animations moins robotiques. La jouabilité en devient nettement plus nerveuse et la frustration que l’on ressentait à ce niveau dans la série se dissipe.
La vue est cette fois encore très (trop) resserrée sur le personnage, empêchant par moment de parfaitement cerner la situation à laquelle le jeu nous confronte. Quoi qu'il en soit, le gain de souplesse est réel et bienvenu, que ce soit à la manette ou au Move, qui se prête assez bien au style de ce Socom.
D'un autre côté, Zipper accompagne ce changement judicieux d’un remodelage total de la campagne solo. Beaucoup plus tournée vers l’action avec un rythme soutenu qui tente de rivaliser avec les ténors du genre (Gears of War ou encore Resident Evil 5), l’aventure semble dilapider quelque peu l’héritage de la série sur l’autel des vagues d’ennemis et des headshots qui s’enchainent. Ce n'est pas particulièrement bien mené ni même jouissif, la série ayant visiblement un peu de mal à exister dans ce nouveau costume pas vraiment à sa taille.
Quelques réminiscences de la série demeurent quand même, comme deux escouades d’équipiers à diriger sur le champ de bataille (ordres simples : aller là, se regrouper, tirer tout de suite ou tirer au signal) et un réalisme relatif dans les impacts que l’on vous autorise à encaisser avant la mort. Même en Normal, Socom n’est pas spécialement facile et ne manquera pas de vous sanctionner lorsque vous oublierez de rester à couvert.
Pour ne pas sombrer dans l’action bête et méchante, ces missions classiques alternent avec des parties d’infiltration convaincantes mais malheureusement bien trop balisées pour convaincre sur la durée. Si la seconde moitié de la campagne est globalement de bien meilleure qualité que son entame, on reste malheureusement sur une succession d’objectifs à accomplir linéairement sans que l’on puisse exploiter le plein potentiel de décors pourtant jolis et bien construits.
Un potentiel tactique mal exploité
Mais le plus gros problème de Socom tient en fait en son intelligence artificielle : ultra-efficaces quand ils sont dirigés par vos soins, vos alliés se transforment en soldats stupides et manchots dès qu’il s’agit de vous couvrir ou de prendre des initiatives. Les ennemis ne sont pas en reste, eux qui sont tant capables de vous mettre des balles à 300 mètres en courant que de se regrouper afin d’aider votre grenade à les exploser en équipe.
On peine au final à jouer tactique quand tout nous pousse vers l’avant, le but étant d’envoyer vos alliés au casse-pipe afin de faire tout le boulot en alignant les têtes au sniper avant d'aller affronter le prochain script. Les meilleurs moments de ces huit heures de solo (en difficile) viennent en fait nous cueillir par surprise, lorsqu’il s’agit d’envahir une base ennemie et que l’on a un peu de temps pour mettre sa stratégie en place. Là, on reconnait le Socom que nous avions laissé (pour mort) sur Playstation 2.
On profite à ce moment largement de l’intelligence des
levels-designers et du talent artistique de Zipper, qui livre cette fois quelques beaux tableaux en plus d’afficher
une variété intéressante des environnements pour le genre (jungle, zone urbaine, port, plage, barrage, bateau, ruines). Ne pas laisser de chance à l’ennemi en préparant le plan d’attaque parfait, c’est toujours aussi grisant… mais bien trop rare dans Socom 4 au final, qui propose qui plus est un cheminement hyper balisé pas spécialement engageant pour de la tactique. Il est bien loin le temps des premiers Rainbow Six ou de Swat…
Coopération, multijoueur et réalisation
Le point fort de la série est et restera le multijoueur.
La coopération vous permet tout d'abord de revenir dans les environnements du solo pour affronter des vagues d'ennemis dont vous définissez le nombre et le niveau, tout en zappant la partie (mal) scénarisée et le côté bien trop mécanique de l'aventure. Très fun, surtout en difficile, ces parties à plusieurs (jusqu'à 5) valident à elles seules les choix réalisés par Zipper au niveau de la maniabilité.
Les
modes compétitifs, très classiques dans la forme (deathmatch, bombe, capture de zones), offre des affrontements jusqu'à 32 qui varient du grand n'importe quoi (deathmatch) aux joutes les plus subtiles, de celles qui ne tiennent qu'à un fil et qui nous mettent en transe. On passe les niveaux, on améliore ses armes et si le
teamplay n'est jamais bien loin du chaos total, on a quand même le sentiment que
le potentiel tactique du titre est bien exploité par sa partie en ligne, et ce malgré l'absence regrettable de différentes classes qui auraient poussé les joueurs à coopérer. La caméra rapprochée nous empêche plus que jamais d'être parfaitement confortable au niveau du champ de vision et quelques problèmes de collision gâchent souvent les corps à corps, mais l'on peut globalement dire que l'expérience proposée est convaincante.
Zipper a fait un bon travail sur la variété de ses décors et la construction des niveaux Les cartes disponibles sont ici aussi bien pensées, même si la réalisation générale n'est - comme pour le solo - pas exempte de tout reproche.
Aliasing, ralentissements, saut lunaire risible et bugs en tout genre gâchent les quelques efforts de mise en scène tentés dans la partie solo. Pas aidée par une
mise en scène ratée et une histoire barbante à souhait, la narration de la campagne n'existe au final que grâce aux sympathiques compositions de l'hyperactif Bear McCreary qui donne une fois encore dans l'efficace, mais sans manquer de talent pour autant.
Conclusion
Entre un solo trop bourrin mis en scène à la truelle et un multijoueur riche en possibilités tout en étant très fonctionnel, Zipper Interactive a plus ou moins réussi sa tentative de rafraichissement de la licence Socom. Malgré quelques bons moments, parfois seul mais le plus souvent à plusieurs, le potentiel du titre est trop souvent gâché par les errances de l'intelligence artificielle, les manquements de la réalisation ou les différents bugs pour que l'on puisse tout lui pardonner. On ne conseillera ce Socom : Special Force qu'aux joueurs motivés par du jeu à plusieurs au rythme posé, qui trouveront sans doute ici l'autre façon de
shooter en ligne qui leur manquait.