Test de Fight Night Champion : l'héritier presque illégitime qui s'assume parfaitement
Quelques semaines après une preview méfiante, il est temps pour nous de tester nos craintes dans la durée. Le nouveau gameplay est poussé dans les cordes pour un verdict finalement pas si négatif...
Fight Night Champion est le cinquième épisode d'une série marqué d'une très forte personnalité en termes de contrôle des boxeurs. Ce dernier volet arrive avec une singulière particularité : c'est le premier qui remet en cause ses fondamentaux techniques. Les parades, les contre-attaques, les feintes, tout a été revu par EA Sports afin de rendre son titre accessible, plus ouvert au grand public. On ignore de quoi tient cette volonté initiale, si les développeurs voulaient vraiment se renouveler ou si la consigne de la maison-mère était de rentabiliser au maximum le jeu quitte à le « casualiser » sur les bords. Quoi qu'il en soit, ce Fight Night entre sur le ring avec un style bien inhabituel.
Pas de round d'observation, on attaque directement en plein cœur du sujet polémique : le gameplay. Ce dernier est simplifié pour l'exécution des attaques. Nul besoin de porter le Joystick droit vers le haut après avoir armé son coup, il suffit désormais de l'orienter vers la direction voulue (les diagonales hautes pour le jab/direct, gauche/droite pour les crochets, les diagonales basses pour les uppercuts). Si cela facilite grandement les assauts enchaînés, les premières victimes de ce changement sont les feintes de frappes. Impossible avec Champion d'armer son coup pour finalement choisir d'en mettre un autre et déstabiliser la garde de l'adversaire.
La garde aussi, parlons-en. Une simple pression sur la gâchette permet de mettre en place un auto-block un peu grossier, qui se charge de couvrir approximativement tout ce qui viendrait vous chatouiller le menton. Il n'est plus d'actualité de couvrir avec assiduité un flanc plutôt qu'un autre, pour mieux contrer un adversaire ou pour protéger une partie du corps devenue trop sensible. Quelque part, cette limitation de la localisation de la garde répond à la problématique des feintes d'attaques : la tactique des assauts ainsi que leurs réponses défensives traditionnelles disparaissent. La fin d'un complexe, mais passionnant, mind gaming.
La prise en main du soft est dans les cordes, ce Fight Nigth doit réagir mais comment ? Ce n'est pas en proposant une nouvelle fois la possibilité de pouvoir taper avec les boutons classiques que cela va changer. Cette hérésie se montre incommode : les coups bas et autres provocations migrent sur la croix directionnelle, les rendant peu pratiques à utiliser car pendant un laps de temps il faut renoncer au joystick gauche et aux déplacement. Inconcevable ! Dans le feu de l'action, il est d'ailleurs très difficile de construire un enchaînement sans s'emmêler les pinceaux. Brouillon et inutile.
Une fois les habitudes des précédents volets perdues, on découvre alors un autre jeu. Qui offre au joueur une nouvelle façon de concevoir la boxe virtuelle. L'action est plus vive, et les assauts puisent leur intérêt dans la construction rapide et alternée de combinaisons gauche/droite, corps/tête, coups rapides/puissants (en maintenant RB sur la 360, ou R2 sur la PS3, on aligne des coups qui mettent plus de temps à se préparer mais qui font plus de dégâts, une subtilité appréciable qui contribue à la simplification de la prise en main). En associant les esquives à la garde, on perfectionne cette dernière en balançant le corps du boxeur de manière à optimiser la préparation des contres-attaque. Une question de timing.
Fight Night Champion mise beaucoup sur l'utilisation des contres pour pimenter le jeu défensif et forcer les matraqueurs à lever le pied. D'autant plus que la jauge d'endurance a une certaine tendance à ne pas pardonner les excès d'optimisme. Quand une offensive échoue lamentablement, il y a un petit ralentissement et un très léger zoom sur le coup parti dans le vent pour signifier qu'il y a une belle occasion de contre-attaque. Ces coups font de sévères dégâts. Attention toutefois : le petit malin qui ne misera que sur les retournements de situation prend le risque de manger sévère avant de pouvoir placer son coup.
Par contre, qu'ils soient préparés ou maladroits, il est estimé que les contres sont forcément puissants. Un boxeur roué de coups aura parfois la chance d'être gratifié d'une belle torgnole alors qu'il ne fait qu'essayer de se défendre sur le fil. La volonté du joueur de préparer une attaque retour n'est pas prise en compte. tout ce qui tombe à peu près bien au milieu d'une attaque est considéré comme une contre-offensive. Le fameux « KO en un coup » est la forme la plus abusive de contre attaque : ça dévisse littéralement l'équilibre des combats en favorisant les grosses brutes qui peuvent ponctuer une joute gantée au petit bonheur la chance. Ce point est en fait la grosse faiblesse du gameplay, une tare héritée de Fight Night Round 4.
Les modes de jeu peuvent être considérés au nombre de quatre en solo. Le mode Combat Immédiat permet de se lancer sur le ring après sélection des boxeurs, le mode Palmarès permet de créer son avatar (ou d'utiliser un des boxeurs présents) afin de le faire devenir numéro 1 mondial dans sa catégorie, le mode Entrainement permet de s'exercer avec les mini-jeux d'amélioration d'expérience du mode palmarès... Puis il y a le mode Champion : la nouveauté de ce Fight Night. D'ailleurs, lors de la première insertion de la galette dans la console, ça commence immédiatement sur ce mode. Le principe : un scénario entrecoupé de combats scriptés.
Dans ce mode, on incarne André Bishop, un boxeur qui tente de faire son come-back après avoir passé quelques années en prison. L'histoire se déroule en trois temps. Le récapitulatif des événements qui ont conduit André en prison alors qu'il était bien parti pour devenir le champion des poids moyens, les quelques combats qu'il a eu le loisir de mener en taule, et la route qu'il doit tracer pour prendre sa revanche en poids lourds. Une trame qui tient la route, avec des personnages attachants et charismatiques (un peu clichés aussi), dans lequel on se surprend rapidement à vouloir connaître rapidement la suite en enchaînant les combats.
Toutefois, ce mode de jeu ne dure à peine que 4/5 heures. Sans prendre en compte les game over, l'échec étant sanctionné de l'obligation de recommencer (aucun scénario alternatif). Le mode Champion reste une bonne façon de s'initier à ce Fight Night : les scripts de combat mettent en scène des situations bien spécifiques à gérer. Cependant, plus on avance dans le jeu et plus cela ressemble à incarner un chat noir à qui l'on doit rattraper le coup : le héros se casse la main droite d'entrée et ne peut boxer qu'avec la gauche sous peine de s'infliger des dégâts, ou alors dès le premier coup il se fait ouvrir l'arcade droite et l'on doit alors veiller à ce que le type en face n'en profite pas pour lui infliger le KO technique sur décision arbitrale.
Le plus gros morceau du jeu reste le mode Palmarès, qui n'est rien d'autre qu'un mode carrière dans lequel on doit faire progresser son poulain au fur et à mesure des combats et séances d'entraînement. Sans oublier non plus la gestion du calendrier, avec les phases de récupération, celle d'échauffement ainsi que la programmation des combats. D'ailleurs, petite astuce : prenez soin de toujours être au maximum d'endurance la semaine du match car ce n'est pas un indicateur mais bel et bien la jauge avec laquelle on débute le combat. S'entraîner une semaine avant son match est préjudiciable ? Mais d'où vient cette idée saugrenue d'EA Sports !?!
La gestion des points d'expérience acquis est similaire à celle du dernier FIFA : on achète des niveaux de compétence avec l'XP (jusqu'à 20 par catégorie, ces dernières étant une vingtaine également) afin de se spécialiser. Une note moyenne sur 100 est ensuite calculée afin de visualiser le niveau global du boxeur. Ce dernier peut ensuite être joué en match rapide en solo comme à deux joueurs. Il est aussi utilisable online : l'intérêt de se créer un boxeur est aussi de pouvoir participer au championnat du monde en ligne face à d'autres avatars personnalisés, pour s'imposer numéro 1 mondial avec autant de boxeurs créés qu'il en faut par catégorie.
En plus, on peut également partager en ligne ses créations avec les autres joueurs. Ce qui permet d'ajouter de nombreuses personnalités à la cinquantaine de boxeurs déjà présents, et également de pallier certains déséquilibres flagrants de contenu (un seul boxeur sous licence dans la catégorie des coqs alors qu'on en trouve une grosse vingtaine chez les lourds !). Chacun peut ainsi se créer un vestiaire à son goût, en important gratuitement les créations des autres joueurs (un Rocky Balboa par-ci, un Brahim Asloum par-là, et un petit Eminem bien décalé pour le fun) afin de les utiliser dans tous les modes de jeu.
Graphiquement, Fight Night Champions s'inscrit très clairement dans la lignée de ses aînés avec de fabuleuses qualités visuelles. L'ensemble se montre très fin et détaillé comme jamais. Qu'il s'agisse du grain de peau, de la transpiration, des mouvements de muscle ou de chair, des effets de textile, des nombreuses blessures au visage (hématomes, coupures, etc.), des projections de sang sur les vêtements ou sur le ring, des effet ombres, ou de n'importe quel autre paramètre, on est en plein cœur du photo-réalisme. Les animations sont deux fois plus nombreuses que dans Round 4, avec une gestion quasi-parfaite des collisions. On frisait la perfection, dommage que l'arbitre passe si souvent devant la caméra, masquant alors le combat.
L'ambiance est également aux petits oignons : l'interface est rythmée par de très bons morceaux de hip-hop américain. Évidemment, il faut aimer le genre. Mais qui apprécie la boxe est forcément réceptif à l'ambiance « bad boy » voulue par les champions actuels. Impressionner son adversaire fait partie du jeu. En match, les très bons commentaires de Christian Delcourt et Jean-Claude Bouttier (le duo mythique de Canal+) tombent toujours sous le sens, en symbiose avec l'action en cours. De l'analyse pertinente, parfois drôle, en temps réel. Les fans d'ESPN vont également être ravis de voir que la VO fait la part belle aux journalistes, commentateurs et consultants de la chaîne sportive américaine.
Là où le titre pêche techniquement, c'est dans son optimisation. Beaucoup de petits temps de chargement parasites viennent s'ajouter aux longues attentes qui précèdent les combats. Par exemple, dans l'éditeur, le jeu se bloque trois secondes dès que l'on change un paramètre physique du boxeur. Quand on lance un événement dans le mode Palmarès, il faut confirmer le choix que l'on vient de faire après avoir attendu cinq secondes. Les cinématiques du mode Champion masquent également des temps de chargement phénoménaux, il suffit d'essayer de les passer pour s'en rendre compte. Par contre, une fois le combat lancé, plus aucune coupure ni loading intempestif. Ouf !
Fight Night Champion n'est pas une évolution, mais une mutation. Le jeu est simplifié mais pas simpliste pour autant : il perd en tactique ce qu’il gagne en vivacité. Il est toujours nécessaire de mettre du rythme dans ses attaques et de bien gérer sa défense, mais on le fait différemment par rapport à ce que la série a pu proposer par le passé. C'est un autre jeu de boxe, ouvert à tous les profils de joueurs. Le seul réel point négatif du gameplay se trouve dans la gestion déséquilibrée, pour ne pas dire abusive, des contre-attaques. Ce n'est d'ailleurs même pas un défaut lié à cette nouvelle prise en main -qui n'est en outre pas si désagréable que ça- mais une tare héritée de Fight Night Round 4. Bien que court, le nouveau mode champion trouve un intérêt non-négligeable si on le considère comme un tutoriel complet. Hormis quelques détails déplaisants comme l'arbitre qui gène trop souvent la vue, ou les temps de chargements, ce jeu est une claque visuelle et un divertissement de choix pour qui aime la boxe anglaise ou qui veut découvrir la discipline.
Les +
- Graphiquement sublime
- Mode Palmarès long et addictif
- Le championnat mondial en ligne
- Vivacité des combats
- Gestion réaliste de l'endurance en combat
- Bande-son hip-hop de qualité et Commentaires pertinents
- Mode Champion innovant...
Les -
- ...mais trop court !
- Temps de chargements
- Arbitre souvent mal placé
- Système de contre-attaque déséquilibré
- Des catégories qui manquent de boxeurs
- La gestion de l'endurance dans le mode Palmarès
La note de jeuxvideo.fr
8.0/10
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